Par Jean-Philippe Martin, agronome spécialisé en cultures patrimoniales
Dans un marché agricole en pleine mutation, les légumes oubliés comme le panais et le rutabaga retrouvent une place de choix. Portés par la demande croissante en produits locaux, bio et insolites, ces cultures représentent une opportunité pour les acheteurs professionnels et les producteurs souhaitant se différencier. Leur résilience face aux aléas climatiques et leur rentabilité en destockage en gros en font des candidats sérieux pour diversifier les exploitations. Cet article explore les atouts de ces légumes racines, leur potentiel commercial et les stratégies pour intégrer ces cultures dans une logique de vente en gros rentable.
Le retour en grâce des légumes anciens : un marché en expansion
Les légumes oubliés séduisent les consommateurs en quête d’authenticité et les chefs étoilés qui les remettent au menu. Le panais, avec sa saveur sucrée et sa polyvalence culinaire, et le rutabaga, riche en vitamines C et adapté aux plats hivernaux, incarnent cette tendance. Selon une étude de l’INRAE, leur production a augmenté de 20 % en 5 ans en France, notamment grâce à leur adaptation aux circuits courts et à la restauration collective.
Pour les professionnels de l’agroalimentaire, ces légumes représentent un créneau peu saturé. Leur culture nécessite peu d’intrants, réduisant les coûts, et leur conservation longue facilite le destockage en gros. Des entreprises comme Ferme de Sainte-Marthe (spécialiste des semences anciennes) ou Germinance accompagnent les producteurs dans cette transition.
Cultiver le panais : techniques et débouchés
Le panais (Pastinaca sativa) apprécie les sols profonds et bien drainés. Semé entre mars et juin, il se récolte après 4 à 6 mois. Résistant au froid, il peut rester en terre jusqu’en hiver, optimisant la logistique de récolte pour les ventes en gros.
Points clés pour réussir :
- Rotation des cultures (éviter les précédents légumes racines).
- Paillage pour limiter les adventices.
- Irrigation modérée pour éviter l’éclatement.
En termes de débouchés commerciaux, le panais trouve preneur auprès des marchés de gros, des transformateurs (soupes, purées) et des épiceries fines. La marque Bonduelle a d’ailleurs lancé une gamme bio incluant ce légume, tandis que Metro le propose frais à ses clients professionnels.
Le rutabaga : une culture robuste pour des marchés niche
Le rutabaga (Brassica napus), souvent confondu avec le navet, est une star des potagers nordiques. Peu exigeant, il tolère les sols pauvres et les climats rigoureux. Sa chair jaune et son goût légèrement sucré en font un ingrédient prisé en cuisine créative.
Conseils de culture :
- Semis en pleine terre de mai à juillet.
- Éclaircissage pour obtenir des racines de calibre homogène.
- Protection contre les altises (voile anti-insectes).
Côté commercialisation, le rutabaga se positionne sur des segments premium. Les enseignes Grand Frais et Intermarché Pro l’intègrent dans leurs paniers « légumes rares », tandis que des startups comme La Ruche Qui Dit Oui le valorisent via des circuits courts. Pour les grossistes, l’astuce consiste à le proposer en lot mixte avec d’autres légumes anciens (topinambour, céleri-rave).
Optimiser la rentabilité : stockage et stratégies de déstockage
La clé pour maximiser les marges avec le panais et le rutabaga réside dans une gestion rigoureuse du stockage. Ces légumes se conservent plusieurs mois en chambre froide (0-4°C, humidité 90-95 %), permettant de lisser les ventes et de répondre aux pics de demande hivernale.
Pour les acheteurs professionnels, le destockage en gros offre des tarifs attractifs hors saison. Des plateformes comme Agrico ou Pomona proposent des lots à prix réduits pour les restaurateurs et les cantines scolaires. En parallèle, des outils de marketing B2B (catalogues en ligne, dégustations) aident à fidéliser les clients.
Les marques à suivre dans le secteur
- Ferme de Sainte-Marthe – Semences bio et conseils techniques.
- Germinance – Spécialiste des variétés anciennes.
- Bonduelle – Légumes transformés incluant le panais.
- Agrico – Grossiste en légumes de conservation.
- La Ruche Qui Dit Oui – Circuit court pour produits niche.
- Metro – Approvisionnement pour professionnels.
- Grand Frais – Distribution de légumes rares.
- Intermarché Pro – Solutions pour restaurateurs.
- Pomona – Plateforme de déstockage agricole.
- Terres de Traits – Cooperative de producteurs locaux.
Le panais et le rutabaga ne sont pas de simples reliques du passé : ils incarnent une opportunité stratégique pour les professionnels de l’agroalimentaire. Leur culture peu gourmande en ressources, leur longue conservation et leur attractivité sur les marchés premium en font des alliés pour diversifier les revenus agricoles et répondre à la demande croissante en produits durables et locaux.
Pour réussir, les producteurs doivent miser sur des partenariats avec des grossistes spécialisés et des outils de gestion de stock intelligents. Les acheteurs professionnels, quant à eux, gagneront à intégrer ces légumes dans leurs catalogues pour séduire une clientèle en quête d’originalité et de qualité.
Enfin, n’oublions pas que redonner vie à ces variétés, c’est aussi préserver notre patrimoine agricole. Comme le dit si bien Jean-Philippe Martin : « Redécouvrir le passé pour cultiver l’avenir ».